interview de Marianne MICHEL

A l’annonce de la sortie du jeu «la bonne presse » nous avons voulu rencontrer Mme MICHEL Marianne, chef de projet chez Débâcle jeux.

 

1/ Comment décririez-vous votre profession à quelqu’un qui ne connaît rien à votre domaine ? 

Je suis cheffe de projets dans le domaine de l’édition de jeux de société modernes. Globalement, ça consiste à faire prendre vie à un jeu, au travers d’un travail de développement, d’ergonomie, mais aussi de marketing poussé. Ce métier ne se compose pratiquement que d’échanges avec de nombreux acteurs. Par exemple, je suis amené à choisir les jeux auprès des auteurs, pour les développer avec eux leur jeux. Nous pouvons aussi sélectionner le directeur artistique, le graphiste ou même l’illustrateur, qu’il faudra briefer pour que le thème et la mécanique de jeu soient en accord. Il faut plaire au public ciblé

En plus, on peut faire appel à des auteurs externes, des play-testers, des relecteurs, traducteurs tout au long du processus, il faut que le distributeur soit convaincu par le jeu pour pouvoir le vendre aux magasins spécialisés par la suite.

 

 

2/ Quelle est la chose la plus surprenante que les gens découvrent souvent sur votre métier ? 

Quand on joue à un jeu de société, on n’imagine pas qu’il y en a tellement de différents et surtout, qu’il y a autant de monde derrière sa conception. Je pense que le us surprenant est le temps que met un jeu à sortir : il faut compter au minimum une journée entière.

 

3/ Comment en êtes-vous venu à choisir cette profession ?

Toute petite, je jouais à Magic avec mon grand frère. Nous faisions beaucoup de jeux de rôle entre nous aussi, l’univers me plaisait beaucoup. Un peu par hasard, on a découvert Munchkin, puis Smash Up puis… Un très grand nombre de jeu.

Cette passion commune m’a donné envie de découvrir qui était derrière ces jeux. En suivant une licence professionnelle jeux et jouets, j’ai pu avoir un aperçu des nombreux métiers du jeu et une petite connaissance du marché.

Par un concours de circonstances, une entreprise tout près de chez moi était en train de faire naître une branche jeux de société. Je m’y suis greffée et, étant une petite entreprise, j’ai pu m’essayer aux différents postes : community management, commerciale, graphiste… pour enfin finir cheffe de projets ! C’est donc plutôt la profession qui m’a choisie

 

4/ Y a-t-il beaucoup d’autres éditeurs de jeux ?

Il existe de très nombreux éditeurs de jeux en France et à l’étranger. Plus de 1000 jeux sortent chaque année en France.

 

5/ Comment se distinguer parmi tous ceux-là ?

C’est très difficile de se démarquer dans ce marché en pleine expansion. Nous avons la chance d’être éditeur et distributeur, ce qui nous permet d’être en contact permanent avec les magasins, qui peuvent nous orienter sur la demande du client.

Les principaux critères qui font qu’un jeu se démarque aujourd’hui, selon moi, c’est l’attractivité de la boîte et du matériel et l’originalité de la mécanique. Deux choses très dures à gérer, la première étant subjective et pour la deuxième, il faudrait presque qu’on puisse tester tous les jeux qui sortent !

6/ Pouvez-vous nous parler d’un projet récent dont vous êtes particulièrement fière ?

Au nom de Débâcle, je suis très fière de Kauri, qui est un excellent jeu. Mais ce n’est pas moi qui ai mené ce projet, alors je vais plutôt parler de Bonne Presse !

Dans ce jeu, chacun est rédacteur en chef à tour de rôle, les autres sont les stagiaires. A chaque tour, le rédac’chef choisit une carte Magazine et tire 5 mots au hasard. Le but pour les autres est de faire un titre de presse qui est en lien avec le magazine et en incluant si possible les mots tirés.

J’en suis fière car je trouve que justement, la boite est attrayante, peu banale, intrigante. Et la mécanique du jeu est d’une simplicité déconcertante qui fait que c’est un jeu original qui va s’adapter à n’importe quel public, et non l’inverse. Ce sont les joueurs qui font le jeu !

 

7/ Quel a été le plus grand défi que vous avez rencontré lors de la réalisation de ce projet, et comment l’avez-vous surmonté ?

Très honnêtement, c’est le projet qui s’est le mieux déroulé parmi tous ceux qu’on a fait, à mon sens. Nous étions tous emballés par le concept au sein de l’équipe. Le travail avec l’auteur s’est passé en très bonne entente. Nous avions un graphiste en interne expérimenté dans la création de magazines. Moi, je suis passionnée par la recherche de beau matériel et d’ergonomie et j’ai pu m’amuser avec ce jeu. A la rigueur, la sélection des mots était un peu difficile. Nous avons dû nous relire de nombreuses fois pour être sûrs que nous n’avions rien de trop “touchy” qui puisse être mal interprété.

 

8/ On voit que Débâcle Jeux produit beaucoup de jeux d’horizons différents. Quel est le processus de sélection des jeux ?

A la base, nous voulions des jeux qui retranscrivent notre côté “geek” tout en étant très accessible et en procurant des sensations de jeu funs et conviviales. Puis, finalement, même ces deux petits critères étaient durs à respecter pour des enfants comme nous.

Désormais, nous fonctionnons principalement au coup de cœur ou à la demande des magasins en ce qui concerne les rééditions ou les localisations.

Comme nous avons beaucoup de coups de cœur, nous faisons des concessions pour arriver à couvrir un large éventail de publics pour que notre distributeur ait de la diversité à proposer.

 

9/ Quelles sont les valeurs que Débâcle cherche à retranscrire au travers de ses jeux ?

D’abord, nos jeux contiennent le moins de plastique possible. On se refuse notamment les magnifiques inserts thermoformés pour ranger les pièces de jeu. Ça nous tient à cœur (mais pas au détriment du jeu… On fait des concessions).

Le milieu étant aussi très masculin pour l’instant, je tiens personnellement à ne pas dévaluer de quelque façon que ce soit les femmes, mais aussi les genres, les races, les orientations sexuelles… Nos jeux sont “friendly” pour tous, pour pouvoir être joués avec n’importe qui.

Enfin, dans la plupart de nos jeux, on a la possibilité d’interagir beaucoup avec les autres joueurs pour les embêter. C’est ça qui rapproche les gens dans un jeu, pas vrai ?

 

10/ Dans votre gamme, quel est votre jeu préféré ?

A titre personnel, mon jeu préféré est Kauri. Je trouve que la façon qu’a l’auteur de développer des jeux en rapport direct avec l’histoire, sans nous ennuyer, est un don ! On joue un jeu “normal”, fluide, mais à la fin, on a appris quelque chose sans s’en rendre compte !

Pouvez-vous nous parler des jeux en cours de développement ?

Nous allons essayer de publier 6 jeux l’an prochain.

  • Un jeu à licence pour les enfants, sur un dessin animé bien connu
  • Un nouveau jeu d’ambiance de Charlec (Kauri) en tant que co-auteur, qui parle du krach boursier
  • La réédition du jeu d’ambiance Profiler
  • Un petit jeu de cartes abstrait et addictif qui se base sur le bluff
  • Un duel de magiciens par les auteurs de Number Drop et l’illustrateur de Kauri
  • Un jeu de plateau familial dans une forêt magique, avec des animaux tout mignons qui doivent apaiser des esprits.